Dans un de mes premiers billets, j'émettais des doutes sur l'intérêt de la fusion Gaz de France Suez. En le relisant, il me semble intéressant de lancer un débat sur l'impact de l'arbitrage transatlantique sur la sécurité d'approvisionnement.
Par "arbitrage transatlantique" on entend la faculté pour les bateaux méthaniers de décider (d'arbitrer) entre livrer leur gaz en Europe ou aux Etats-Unis. Et comme les opérateurs ne sont pas des poètes, ils arbitrent pour vendre où le prix est le plus élevé.
Cet arbitrage est un des leviers de "création de valeur" de GDF Suez. Si on regarde le document en page 9, on se rend compte que "l'arbitrage de spread géographique" permettrait de réaliser des gains substantiels à cet opérateur car en vendant au maximum de deux prix, GDF Suez gagne nécessairement plus qu'en vendant à un seul des deux prix.
Cependant, Gaz de France, du temps où il n'était pas encore dans le giron de Suez exprimait les doutes les plus sérieux sur l'impact de tels arbitrages sur la sécurité d'approvisionnement. Elle écrivait ainsi, dans un document présenté à la Commission, "l’arbitrage trans-atlantique qui présente par ailleurs des opportunités d’optimisation intéressantes, pourrait constituer une menace immédiate sur la sécurité d’approvisionnement européenne".
Alors, en cas de risque de pénurie gazière en France et aux Etats-Unis, vers où iront les méthaniers affrétés par GDF/Suez ? Iront-ils livrer leur gaz aux Etats-Unis si ceux-ci proposent un meilleur prix, au risque de ne pas fournir les besoins nationaux ?
Je n'en sais rien, et personne à ce jour ne semble se poser cette question. Et ce n'est plus Gaz de France qui ira soulever ce problème. Il est devenu GDF Suez.
Il y a 11 ans
3 commentaires:
aujourd'hui ce type d'arbitrages existe sur le pétrole ! est-ce pour autant que les stations-services sont vides et que nous ne pouvons pas rouler ?
@anonyme
c'est un des termes du débat.
Ceci dit, il existe une obligation légale de "stockage stratégique" pour le pétrole qui n'a pas d'équivalent pour le gaz (le pétrole se stockant plus facilement que le gaz).
Quelques précisions quand même.
Il y a une obligation légale de se doter des moyens de fournir sa clientèle non interruptible dans les cas suivants :
- disparition pendant six mois au maximum de la principale source d'approvisionnement dans des conditions météorologiques moyennes
- hiver froid tel qu'il s'en produit statistiquement un tous les cinquante ans
- température extrêmement basse pendant une période de trois jours au maximum telle qu'il s'en produit statistiquement une tous les cinquante ans.
Il y a aussi une obligation sur le stockage, qui consiste à disposer au 1er novembre de chaque année de 85% des droits à stockage correspondant à la consommation des clients résidentiels et MIG.
Il y a aussi des obligations de service public relatives à la sécurité d'approvisionnement dans l'autorisation de fourniture de gaz. Elles se trouvent aussi dans le défunt contrat de service public.
Dans tous les cas, je doute fort que GDF Suez aille risquer de couper le gaz en France pour aller gagner quelques millions d'euros d'arbitrage sur les marchés. Ce serait peut-être bon pour les alternatifs, remarquez.
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