jeudi 14 janvier 2010

Le retour de Voltalis

On peut critiquer M. Bivas (c'est apparemment la mode dans le milieu de l'énergie) mais on ne peut lui renier une qualité : la persévérance.

Rappelons qu'il a fondé une entreprise, Voltalis, qui cherche à valoriser les "effacements diffus" via le mécanisme d'équilibrage en temps réel du système électrique (dit "mécanisme d'ajustement"). Pour ce faire, Voltalis installe des équipements au domicile des consommateurs, équipements qui permettent aux installations de ses clients de "s'effacer" au moment des pointes.

Après de nombreux revers cet été, et une délibération qui lui était au fond défavorable de la CRE, voici que Voltalis relance le débat sur les effacements de pointe. Un article du Nouvel Observateur lui est en effet consacré.

Le problème est que cet article, très largement acquis à Voltalis, est truffé (c'est encore la saison) d'erreurs factuelles, principalement parce que sous couvert de permettre des économies d'énergie, Voltalis ne permet en réalité que des économies de puissance (je passe sur le fait que les "centrales au gaz" ne font pas en général 200MW).

Je m'explique.

Voltalis génère des ordres via les réseaux télécoms qui éteignent essentiellement les ballons d'eau chaude et les radiateurs électriques. Or l'énergie qui ne sera pas consommée au moment des effacements sera en fait reportée à une période ultérieure : il faudra bien, in fine, chauffer l'eau et chauffer le logement.

Dès lors que cette consommation finale est simplement "reportée" de quelques dizaines de minutes, donc la plupart du temps au sein de la même période tarifaire d'EDF, on a du mal à croire que les clients puissent économiser 100 € par an.

Ce report de consommation, s'il ne permet pas d'économie d'énergie consommée ni de facture, n'est cependant pas sans intérêt pour le système électrique car il permet de reporter cette consommation au moment où le système est moins sollicité ou moins tendu (c'est ce que dans le jargon électrique on appelle une économie "en puissance").

Voltalis permet ainsi, dans une certaine mesure, une économie d'énergie primaire (c'est à dire de l'énergie consommée par les centrales électriques) s'il reporte de la consommation vers des périodes où des centrales plus efficaces sont utilisées (ce qui est en général le cas : les centrales les moins efficaces sont normalement utilisées à la pointe).

Le problème est que Voltalis est trop gourmand : il veut être rémunéré comme s'il générait une "réelle" économie d'énergie alors qu'il ne s'agit que d'une économie partielle par substitution entre moyens de productions, d'une économie "en puissance".

C'est dommage, car l'idée proposée par Voltalis me semble bonne et on en vient maintenant à voir la plupart des acteurs (les alternatifs, EDF et la CRE en particulier) s'opposer à un système qu'il faudrait plutôt favoriser.

"Errare humanum est, perseverare diabolicum", en quelque sorte.





5 commentaires:

Unknown a dit…

EDF teste actuellement l'effacement de ses propres clients dans les Côtes-d'Armor Lien vers l'article
Et si Voltalis veut survivre, elle devrait essayer de trouver, assez rapidement, un arrangement avec la CRE et les autres acteurs, au sujet de la rémunération de l'effacement diffus.

Anonyme a dit…

après les effacements diffus, les effacements confus?

Anonyme a dit…

Au fond, c'est toujours la même histoire. Il y a ceux qui ont des idées pour faire vraiment avancer les choses et ceux pour faire de l'argent.

Unknown a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Unknown a dit…

On m'a rapporté que les difficultés auxquelles se heurte Voltalis proviennent du fait qu'il a approché le marché en proposant de financer son outil sur la base des mécanismes d'équilibre et d'ajustement et ainsi de vivre sur un business model qui pourrait s'apparenter à celui de "responsable d'équilibre virtuel". Comme c'est très justement expliqué dans le billet, voltalis ne contribue pas réellement à l'équilibre du système, mais à la répartition/diffusion au sein de l'équilibre. D'où le front uni auquel il est confronté.

Il ne souhaite donc pas vendre un service de réduction de consommation pour le client final, mais plus exactement revendre aux fournisseurs et aux RE leur propre énergie.

Cela étant dit, il est permis de penser qu'il trouvera facilement le moyen de revendre son affaire, surtout que les projets de smartgrid sont une des priorités du secteur et que dans ce cadre ce type d'outil fait du sens